Tiens, je profite de ton retour sur le live pour poster un avis un peu OSEF sur le "Litourgiya" de Batushka !
En voilà, un album qui m'a plongé dans une profonde expectative... Dans un premier temps, la mariée toute vêtue de noir avait tout pour séduire : un bel esthétisme (cette pochette !), un son juste parfait (ce mixage ! Cette cohérence ! Cet équilibre ! Tout est audible et distinct : les basses, les voix, les guitares...), les critiques (même chez Blackmetalrama pour qui l'album fait l'unanimité). Je suis aussi intrigué par la dimension politique du projet. Un groupe apparemment polonais donc évoluant dans un contexte de grande rigueur politique, fortement marqué par le conservatisme et la réaction catholique et qui insère dans son BM des éléments orthodoxes. Conclusion : Batushka est à la fois menacé par les courants d'extrême droite nationalistes en Russie (ils ont été menacés de mort à Moscou) et n'est pas franchement en odeur de sainteté dans son propre pays du fait de la référence à l'orthodoxie du voisin. Mais à la première écoute, déception. Je passe à côté. Envolée, mon excitation ; déçue, ma curiosité aiguisée par tant d'éloges...
Je trouve l'album brillant (toujours cette prod' lumineuse et majestueuse) mais quelque chose ne prend pas. J'ai du mal avec les chants orthodoxes, leur insertion dans le son global. Je trouve l'ensemble... Kitsch, presque ringard. Cela me rappelle les pires heures des machins New-Age des années 90 : Era qui rencontre Le Chant des Pierres, le tout passé à la sulfateuse métaleuse. Bon, certes les trémolos de guitare, bien dans la tradition du BM "orthodoxe" pour le coup me titillent dans le bon sens mais voilà... ça ne prend pas. "Je vous vois venir" semble me dire mon inconscient musical à l'écoute de ces liturgies trop polies pour être honnêtes.
J'avoue surtout avoir du mal avec la voix lead des choeurs en fait : toujours cette voix basse/baryton alors que les chants orthodoxes peuvent être d'une richesse dans les tessitures inouïe.
Exemple :
(C'est juste magnifique)
Je trouvais le truc caricatural, un peu facile, presque poudre aux yeux, factice.
Et à force d'écoute (si hobbs aime, c'est bien qu'il y a un truc), j'ai compris le délire à partir de "Yekteniya 5" et de toute la seconde moitié de l'album (la plus réussie selon moi). C'est ici - mais ce n'est que mon avis, hein ! - que Batushka arrive à produire quelque chose de vraiment fascinant, en réussissant à faire se rencontrer les deux esthétiques. Les chants orthodoxes deviennent des sortes d'incantations inquiétantes et impressionnantes ; le son BM et la voix hurlée, un paysage ténébreux qui les accueille. Bref, pour moi, la rencontre se produit à ce moment précis de l'album.
Et la ritournelle de "Yekteniya 6" m'a rappelé étrangement - mais vraiment étrangement ! - "Ederlezi" de Bregovic (même si je vous l'accorde, on n'est loin des vociférations blackeuses !) :
Bref, étrange voyage. Mais je remercie Blackmetalrama de m'avoir conduit à insister un peu. Parfois, certaines découvertes se méritent !