➔ Warpig - 04 Oct 2024
Amazon avait plafonné sous les 500 K

Au procès des vrai-faux agents à Marseille, l'ombre de Jean-Pierre Bernès

À l'origine de l'enquête après son signalement au parquet de Marseille d'une vaste affaire liée aux commissions des transferts, l'historique agent Jean-Pierre Bernès est accusé par la défense d'avoir « instrumentalisé » la justice pour « régler des comptes ».

C'est un absent très présent. Depuis lundi et le premier jour d'audience de l'affaire des commissions au tribunal correctionnel de Marseille, le nom de Jean-Pierre Bernès a été cité à d'innombrables reprises, presque autant que celui des huit prévenus. Non sans raison : c'est son signalement qui a précité l'ouverture de l'enquête judiciaire et les poursuites actuelles.

Pour mieux comprendre, il faut remonter à l'automne 2021. Le 26 octobre 2021, exactement, Bernès transmet un courrier au parquet de Marseille, dans lequel il se plaint des méthodes employées par John Valovic-Galtier, fils adoptif de Christophe et soupçonné d'officier tel un agent sans en détenir la licence. Bernès cible notamment le récent transfert, à l'époque, d'Andy Delort, un de ses anciens clients (parti d'après lui auprès de Valovic-Galtier), à Nice, alors entraîné par Galtier père.

Très intéressé par ces dénonciations, le parquet convoque l'agent le 10 décembre 2021 en audition, en compagnie de son avocat. Il détaille ses reproches, l'enquête part au parquet de Nice (avant de revenir à Marseille plus tard). « Bernès, qui visiblement a ses entrées au parquet, est votre boussole », a pointé Me Sébastien Schapira, avocat de Valovic-Galtier, lundi matin. Une tirade peu appréciée par le procureur de la République Jean-Yves Lourgouilloux.

Et la robe noire de développer à la barre : « On ne peut pas admettre qu'une procédure soit fabriquée de cette façon. C'est désagréable quand la justice est instrumentalisée pour régler des comptes. Il a balancé ses boules puantes en qualité de témoin et nous laisse dans ce marigot. C'est une façon de procéder déloyale. » Ses confrères de la défense acquiescent en chaîne. En fond de salle, sur la gauche, une partie de la famille Galtier a fait le voyage et suit attentivement les débats.

Les Galtier et Bernès voisins à Cassis

Bernès, lui, ne s'est pas déplacé, ni lundi ni ce mardi, et ne s'est pas non plus constitué partie civile. Certains le regrettent. Mais les deux camps n'ont pas besoin d'aller jusqu'au tribunal pour se croiser. Les résidences des Galtier et de Bernès sont distantes d'à peine deux kilomètres dans la ville voisine prisée de Cassis, sur les hauteurs, avec vue plongeante sur la baie méditerranéenne. La rumeur locale dit même que chacun prend le soin d'éviter de prendre le chemin de l'autre.

S'ils se retrouvent ici ce mardi, ce n'est pas non plus un hasard. Bernès a, un temps, représenté les intérêts du coach Galtier. Jusqu'à une rupture en 2015. Entre-temps, Bernès, également ex-conseil de Laurent Blanc et toujours au chevet du sélectionneur des Bleus Didier Deschamps, a mis le pied à l'étrier de Valovic-Galtier. Selon Bernès, Galtier père aurait bien aimé que son fils adoptif rejoigne l'agence du premier nommé. Ce que ce dernier aurait refusé. D'où, toujours d'après lui, la rupture avec l'entraîneur, qui se tournera vers la structure lyonnaise Score Agencies.

Valovic-Galtier a longtemps travaillé pour Score Agencies, comme simple scout à l'écouter, et la justice lui reproche notamment d'avoir joué à l'agent en touchant des commissions lors de la signature de son père au Qatar et de son demi-frère Jordan à Toulouse. Des accusations appuyées par un ancien salarié entre 2015 et 2020 de Score Agencies, Michael G., aujourd'hui employé par... la société de Bernès depuis 2020. « Je sais que Valovic-Galtier est en tort avec la profession : j'ai des mails, des documents, des captures d'écran », aurait glissé le témoin aux policiers. La défense rit jaune.

Même effarement exprimé par David Venditelli, ex-boss de Score Agencies, quand le tribunal évoque l'audition de Julien Fournier (ex-Nice), selon qui « Venditelli s'est présenté (à lui) comme l'agent de Christophe ». « Je ne sais pas quoi répondre, a soupiré Venditelli lundi. On parle bien du même M. Fournier qui a porté des accusations mensongères contre M. Galtier ? » « Je pense que M. Fournier ne s'est pas gêné de lancer quelques piques me concernant. C'est un menteur », a appuyé Valovic-Galtier ce mardi matin à la barre.

Dans ce dossier, l'audition de Fournier s'est déroulée en octobre 2023, soit deux mois avant le procès et la relaxe de Christophe Galtier par le tribunal de Nice des faits de harcèlement et de discrimination, rapportés à la justice par Fournier six mois plus tôt. Lors de ce procès, Galtier était défendu par Mes Schapira et Olivier Martin, son avocat historique. On retrouve à Marseille Me Schapira à la défense de Valovic-Galtier et Me Martin auprès de Damien Comolli, président de Toulouse, coprévenu. Associé de Me Martin, Me Benjamin Chomel défend, quant à lui, Venditelli. Petit est le monde du ballon rond.