Débordant du cadre légal, certains vendeurs de rue gonflent les volumes – et leurs profits – en coupant la résine avec du cirage ou de la colle. D'autres ajoutent des cristaux de cocaïne ou d'héroïne, pour fidéliser la clientèle et amorcer la montée en gamme du consommateur… Troubles graves et dépendance garantis.
Selon Xavier Raufer, les organisations criminelles se sont renforcées ces vingt dernières années, « avec les conséquences que cela entraîne sur la société, notamment la montée de la violence, une hausse des homicides liés à la rivalité entre gangs pour le contrôle du marché, un développement des séquestrations et des tortures ».
Attaque à la grenade, tirs d'armes de guerre, corps plongés dans l'acide ou le béton : les règlements de comptes violents entre bandes rivales se multiplient. Pour Raufer, les réseaux veulent maintenir le statu quo sur la dépénalisation et la commercialisation du cannabis : « Ils ont ciblé les élus "pas cool" avec eux : ayant déclaré que les coffee shops de sa ville étaient liés au crime organisé, Rob van Gijzel, maire d'Eindhoven, est sous surveillance policière. Menacé avec sa famille, Fons Jacobs, maire de la ville voisine de Helmond, a dû fuir et se cacher. »
Le phénomène dépasse maintenant les Pays-Bas. Selon Michel Gandilhon, les gangs s'implantent en Belgique : « Au Brabant-Septentrional et en Flandre, en multipliant les serres clandestines, les trafiquants ont littéralement reconstitué une sorte de Rif [les montagnes marocaines où se cultive le cannabis] indoor, qui produit 1 000 tonnes d'herbe par an. » Le phénomène gagne l'Allemagne et le sud de l'Europe – donc la France : « Les Pays-Bas sont au coeur de la géopolitique européenne de la drogue. »
Une sanglante guerre souterraine a commencé entre les gangs rivaux pour le contrôle du marché des drogues "douces". Pour combler leur manque à gagner, certains se reconvertissent dans le trafic de cocaïne et de drogues de synthèse, encore plus dangereuses. La dépénalisation en France aurait les mêmes effets pervers. Convulsée de rire sur son sofa, Sophie n'est pas inquiète : « La skunk, c'est trop cool. »