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Patrick Bateman
huge

superframboisier - 07 Dec 2008

Désolé, moi j'ai pas mal d'arguments sur pourquoi elle n'est pas guérissable (ça va pas beaucoup t'aider sauf si tu décides de faire l'antithèse et de l'argumenter).

En gros :

* la démographie des pays développés est telle qu'elle ne permet plus de générer de la croissance et de l'inflation de manière naturelle comme la période 1945/1975 (baby-boom, reconstruction après la guerre, souvenir de 1929 et keynésianisme, modèle fordiste et pression des communistes en France par exemple)
* la dette qui n'est plus utilisée comme investissement (infrastructures d'Etat, entreprises) mais comme substitut à la consommation pour tenter de maintenir artificiellement la croissance (par exemple, depuis 2002, en UK et France, sans dette, nous serions en récession. autre exemple, pour générer 1$ de croissance aux US, ils sont obligés de prendre 3$ de dette). Sauf que c'est un système de cavalerie, les dettes il faut les rembourser à un moment donné...
* la tronche de la pyramide des âges : de moins en moins d'actifs, de plus en plus de retraités + coûts croissants de la santé qui en découlent.
* la chute de 10 points de la part des salaires dans le PIB depuis 20/30 ans : on a remplacé ça par de l'endettement pour tenter de maintenir le taux de croissance.
* le rapport de volume entre les flux financiers et l'économie réelle, notamment grâce aux dérivés d'actions : le rapport est je crois de 1 à 20 (20 fois plus de pognon qui tourne pour la spéculation que pour l'économie réelle...)
* les bulles spéculatives dans pratiquement tous les actifs : entreprises, matières premières (ça a un peu reculé quand même), oeuvres d'art, foncier et immobilier. Ça ne peut que chuter en valeur d'échange.
* les pays émergents qui ne pourront pas trop prendre le relais de croissance (un peu à la marge mais ça ne sauvera pas grand chose)
* depuis 1971 et la fin de la convertibilité du dollar en or, la monnaie peut-être imprimée à foison, il n'y a plus d'obligation de détenir autant d'or que de dollars imprimés.
* depuis 2006, le chiffre l'agrégat M3 des États-Unis n'est plus publié. Il représente la masse de $ en circulation. En clair : les américains peuvent imprimer autant de dollars qu'ils veulent, personne ne peut savoir combien. Ils ne s'en gênent d'ailleurs pas depuis 3 mois.
* la libéralisation des marchés fait qu'il n'y a plus d'inertie dans un sens comme dans un autre : il n'y a plus d'amortisseurs, les réactions sont brutales : chutes des cours, licenciements, chute de la consommation. Ça joue comme amplificateur.
* last but not least, le facteur environnemental, climatique et de raréfaction des matières premières mais je n'ai pas assez d'information pour savoir si ça va aggraver le problème ou pas (les systèmes et informations à ce niveau sont très durs à récupérer de manière fiable, on a jamais été confronté à ce genre de crise environnementale si tant est qu'elle existe, au contraire d'une crise financière qui a déjà eu lieu (1929) et il y a beaucoup d'idéologies d'un côté et de l'autre dans ce domaine).

Globalement on était dans un système de cavalerie : je prends toujours plus de dettes pour continuer à avoir un taux de croissance fictif, mais ça a une fin.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_d%27 … #Cavalerie

Donc le gros risque maintenant c'est la déflation : chute de la valeur des actifs, des salaires, des prix à la consommation. Donc les endettés sont dans la merde : leurs dettes augmentent en pourcentage par rapport à leurs revenus, et ceux qui arrivent à avoir un peu d'excédent d'épargne n'investissent pas : trop de risque de voir la valeur de l'actif descendre, ils thésaurisent : je garde mon pognon en cash ou en or, sauf que du coup plus du tout d'investissement et un cercle vicieux de chute.
La phase d'après c'est l'hyperinflation : on augmente la création de monnaie mais ça ruine les épargnants (mais on s'en fout, c'est que des vieux). Par contre, pour les jeunes c'est plutôt pas mal, ça permet de s'endetter sans problème (tout est remboursé super vite) et vu que la majorité de nos revenus sont des salaires, ils sont obligatoirement indexés sur l'inflation. Par contre les vieux qui vivent actuellement avec une grosse partie de leurs revenus qui proviennent de placements financiers, ils sont bien dans la merde.
Au passage, ça donne des billets de 200 milliards de dollars comme au Zimbabwe actuellement.

La leçon de 1929, c'est qu'il faut à tout prix éviter la déflation, ce que les USA n'ont pas fait de 1929 à 1933, après le New Deal a remis de l'ordre là dedans. C'est pour ça que Sarko annonce des grands travaux et Obama aussi. Le problème c'est qu'on est pas sûr du tout que ça marche...

Tout ça parait apocalyptique et bien loin mais par exemple le Brésil en 93 a subi une hyperinflation, ils sont toujours là.

Du reste, tout ça n'est pas exhaustif, les tenants et aboutissants sont très compliqués et tout se tient et à un impact sur le reste (taux de change, taux directeurs des banques centrales, pourcentage d'épargne, etc).

Je te conseille de lire ça pour comprendre certains mécanismes et le parallèle avec 1929 :

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/m … s_1998.htm

Par contre, je suis très intéressé par tous les arguments sur le "How this crisis can be cured ?". Parce que personnelement, je ne vois que peu de moyens de s'en sortir sans passer par une dépression à la 1929/1933.

Je vois juste une croissance verte, genre isolation des habitations : emploi, économies d'énergies (solde négatif envers les pays étrangers pour leur acheter gaz et pétrole) mais ça n'ira pas bien loin...